Noyée par la pandémie, la Tunisie se sépare de son ministre de la Santé
A l'issue du premier jour d'une campagne de vaccination exceptionnelle ouverte à tous les Tunisiens âgés de plus de 18 ans, le ministre tunisien de la Santé Faouzi Mehdi a été limogé.
La situation est compliquée. Alors que la Tunisie fait face à une nouvelle vague très virulente, le chef du gouvernement tunisien Hichem Mechichi a décidé de limoger le ministre de la Santé Faouzi Mehdi, ont annoncé ses services dans un communiqué lapidaire, sans expliquer les raisons de ce limogeage, alors que le gouvernement est déjà affaibli par des tensions.
Pourtant, Mehdi est à l'origine de l'ouverture temporaire de la vaccination à tous les Tunisiens de plus de 18 ans pendant deux jours mardi et mercredi, à l'occasion des jours fériés de l'Aïd al-Adha, la plus importante des fêtes musulmanes. Cette ouverture a entraîné une ruée dans les 29 centres de vaccination concernés, causant des scènes de bousculades et de nombreuses déceptions face à l'épuisement rapide des doses disponibles.
Un gouvernement affaibli
Face au succès de l'opération, le ministère de la Santé avait annoncé plus tôt dans la journée qu'il la poursuivrait "pendant les prochains jours" avant de restreindre l'accès à la vaccination aux plus de 40 ans dès mercredi pour éviter de nouvelles cohues. Le ministre des Affaires sociales, Mohamed Trabelsi, deviendra ministre de la Santé par intérim, dans un gouvernement déjà affaibli par le départ de nombreux ministres non remplacés après un remaniement resté inabouti.
Le président Kaïs Saïed, qui jouit d'une importante popularité, a refusé en janvier de laisser prêter serment des ministres pourtant validés par le Parlement. Résultat: le gouvernement compte depuis de nombreux ministres intérimaires cumulant plusieurs fonctions, notamment à la Justice, ou à l'Intérieur.
Le président, en froid avec le principal parti parlementaire, le mouvement d'inspiration islamiste Ennahdha, avait nommé M. Mechichi en août dernier. Mais ce dernier avait lancé ce remaniement, qui concernait une dizaine de ministres, en coordination avec Ennahdha pour assurer au gouvernement le soutien de sa coalition parlementaire. Le ministère de la Santé avait alors été attribué à un médecin de Sousse (est), mais Faouzi Mehdi avait finalement conservé son portefeuille à la faveur de cette crise politique.
Engouement pour la vaccination
Depuis mars, la Tunisie convoque ses habitants pour se faire vacciner par tranche d'âge. Seuls les plus de 50 ans et certaines professions prioritaires sont pour le moment concernés alors que le pays connait depuis quelques semaines une hausse des cas inédite avec des hôpitaux débordés.
La Tunisie a officiellement enregistré près de 550.000 cas de coronavirus, dont 17.644 décès. La campagne de vaccination est longtemps restée poussive, d'autant que les stocks de vaccins étaient jusqu'à récemment très limités. Quelque 937.000 personnes ont été complètement vaccinées, soit environ 8% de la population, un taux trop bas pour freiner la contagion même s'il est parmi les plus élevés d'Afrique.
Face aux pénuries d'oxygène, de personnel médical et de lits de réanimation, la situation sanitaire en Tunisie est devenue catastrophique, poussant de nombreux pays à envoyer de l'aide médicale ces derniers jours. Alors qu'elle est dispose désormais d'environ 3,2 millions de doses et devrait dépasser les 5 millions de vaccins disponibles à la mi-août, a indiqué le ministère de la Santé, "c'est une course contre la montre", a indiqué la pédiatre Rafla Tej Dellagi, responsable du centre de vaccination de Tunis centre. Selon elle, il faudrait vacciner 100.000 personnes par jour contre 40.000 actuellement pour couper la chaîne de transmission.
Les vaccins devraient être accessibles en pharmacies à partir de la semaine prochaine pour les personnes âgées de plus de 40 ans. Le gouvernement s'est vu reprocher sa gestion de l'épidémie, notamment après une réunion gouvernementale dans un hôtel haut de gamme avec piscine à Hammamet (est), ce week-end, en dépit des interdictions de circuler et alors que des dirigeants d'hôpitaux, à bout, craquaient.
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