Mao Ma Souhe : "Le sort des enfants autistes va s’améliorer au Cameroun"
Longtemps considéré comme le seul centre de prise en charge de l’autisme en Afrique centrale, le Centre Orchidée Home peut aussi compter sur l'existence de nouvelles structures pour mieux traiter ce trouble neuro-développemental
Le Centre Orchidée Home, structure socio-sanitaire fondée en 2005 à Douala, s’emploie à soigner et réhabiliter les enfants atteints d’autisme, ce grave trouble du développement qui réduit la capacité à communiquer et à interagir. Pour réussir sa mission, le centre a entrepris de former lui-même le personnel devant s’occuper des enfants autistes.
L’action du centre, qui a été créé par Marie Mélanie Bell, ne s’arrête pas là ! Une école primaire spécialisée qui forme les élèves atteints d'autisme a aussi vu le jour. Les petits ont ainsi la possibilité d’intégrer le système éducatif normal, après leur passage au sein du Pavillon scolaire Chantal Biya. Le psychologue et orthophoniste Mao Ma Souhe, directeur du Centre Orchidée Home, nous en dit plus sur cette institution. Entretien
AlloDocteurs.africa : Depuis quelques années, on a l'impression que la prise en charge de l'autisme au Cameroun s'améliore. Est-ce vrai ?
Mao Ma Souhe : Nous nous sentons de moins en moins seuls, parce que de 2005 à aujourd’hui, ça fait quand même un long parcours que nous avons effectué presque orphelins. Avec les initiatives qui sont prises, nous sommes assez satisfaits. Nous comprenons deux choses : la première est que dans la mentalité des Africains et des Camerounais en particulier, la notion d’accompagnement des personnes à besoins spécifiques est déjà intégrée. La deuxième chose, c’est la mobilisation assez énorme qu'on voit aujourd'hui. Auparavant, il était difficile de comprendre ce que c’est l'autisme mais maintenant, avec des exemples vus de chez nous, les gens ont décidé de prendre le bâton de pèlerin et de se mettre en marche.
Le sort des enfants autistes va s’améliorer au Cameroun. Plusieurs institutions signifie une collaboration entre les différentes structures, qui vont forcément se rencontrer à un moment donné. Cela signifie également un enrichissement de ce qui est fait de part et d’autre. Sur un troisième plan, c’est l‘expertise, venue des différents partenaires que nous allons rencontrer au fil du temps, qui va augmenter et prendre plus en considération tous ceux qui sont sur le terrain de la bataille contre l’autisme.
A.D.A : Le Centre Orchidée Home forme du personnel spécialisé. Pourquoi ?
M.M.S : Au départ, quand nous avons ouvert le Centre Orchidée Home, il était question de faire la prise en charge et l’accompagnement des personnes avec autisme et de leurs familles. Mais avant cela, nous avons commencé par une sensibilisation, puis par la mise sur pied de l’Institut et l’accompagnement des personnes avec autisme. Mais nous avons constaté qu’il n’y avait pas de professionnels pour accompagner toutes ces personnes. Nous avons donc commencé avec l’aspect formation. Pour toucher le plus grand nombre, il ne faut pas se contenter des grandes villes que sont Yaoundé et Douala, mais toucher les 10 régions du Cameroun, où il manque souvent des professionnels de santé. Il va falloir que les formations s’étendent et que les mesures gouvernementales accompagnent ceux qui veulent bien se former.
A.D.A. : Comment appréciez-vous la situation de l’autisme au Cameroun ?
M.M.S : Ce qui est fait est déjà pas mal. Mais le combat a encore du chemin à faire, nous sommes encore dans les prémices. Si vous prenez l’avancée de la prise en charge de l’autisme dans le monde, aux Etats-Unis, en Belgique, en France, vous constaterez que nous sommes encore à des années-lumière de ce qui se passe ailleurs. Ce ne sont pas les compétences qui manquent, mais la capacité à trouver toutes ces personnes et à les mettre ensemble pour pouvoir faire avancer la cause de l’autisme. Nous sommes sur le bon chemin et nous pensons que les lendemains seront meilleurs et que les gens vont s’intéresser de plus en plus à cette cause. Le sort des autistes au Cameroun s’est déjà amélioré : de plus en plus, nous avons des parents qui consultent, qui ont consulté, qui étaient accompagnés.
Dans le cadre du pavillon scolaire Chantal Biya, nous avons des enfants qui chaque jour rejoignent l’école ordinaire et qui y sont évalués au même titre que leurs autres camarades ! C’est la politique de la fondatrice, Marie Mélanie Bell, qui est elle-même maman d’un enfant autiste, aujourd’hui âgé de 32 ans. A l'époque, alors que c’était le désert, elle a mis sur pied une école pour les enfants autistes et aujourd'hui nous travaillons à créer une école de métiers pour ces enfants. Après la formation, ils vont pouvoir s’insérer progressivement dans la société. C’est un pas de géant !
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