Cliniques privées : Au Maroc, la santé est un business

Face aux carences de l’offre publique de soins au Maroc, les cliniques privées se multiplient. Objectif : répondre aux exigences accrues des patients.

Badr Kidiss
Badr Kidiss
Rédigé le
L'hôpital privé de Salé, l'une des nombreuses cliniques d'Akdital
L'hôpital privé de Salé, l'une des nombreuses cliniques d'Akdital  —  Akdital

La santé se facture. Au Maroc, la généralisation de l'assurance maladie (AMO) ne fait pas que des heureux. Si certains Marocains ne bénéficient pas encore de cette "révolution" au Royaume chérifien, un nombre croissant de leurs compatriotes choisit de payer (cher) pour se soigner. Car depuis la libéralisation du secteur des cliniques privées en 2015, celles-ci sont de plus en plus nombreuses. Une preuve ? Il suffit de jeter un oeil sur les statistiques : une centaine de cliniques privées en 1990, plus de 400 aujourd’hui, soit environ 90 % des centres de soins primaires au Maroc. 

La généralisation de l'assurance maladie obligatoire (AMO) promet d'améliorer l'accès des citoyens aux hôpitaux publics. Mais pour l'heure, elle produit l'effet inverse. Selon une enquête de L’Économiste-Sunergia, la grande majorité des Marocains optent pour une clinique privée, même lorsqu'ils peuvent se diriger vers un hôpital public. 

"Sur le plan de la consommation médicale, les cliniques privées constituent le premier poste de dépenses en tiers payants pour l'assurance maladie obligatoire et le deuxième prestatataire de soins dans les dépenses courantes de santé au niveau national", alertait, en 2022, le Conseil de la Concurrence. Et comme si ce n'était pas assez, le nombre des lits dans les hôpitaux marocains a chuté de 1% entre 2017 et 2022, alors que celui des cliniques privées a augmenté de 50%. 

L'hôpital du 20 août 1953 à Casablanca

Cliniques privées, un mal pour un bien ?

Si les hôpitaux publics tentent tant bien que mal d'améliorer leurs offres de soins, le manque de moyens et de ressources humaines freinent leurs velléités. En face, les cliniques proposent des services qui n'ont rien à envier au must des pays occidentaux. Et l'amélioration du système de santé marocain passe visiblement par le secteur privé. 

En pleine pandémie du Covid-19, le Maroc disposait de 9,9 lits pour 10.000 habitants, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Contre 27 en moyenne dans le monde. Et à en croire Redouane Samlali, PDG d'Oncorad, groupe de cliniques privées, au moins 700 cliniques privées supplémentaires seraient nécessaires pour que le nombre de lits soit suffisant. 

Leader du secteur, le groupe Akdital - introduit en Bourse il y a un an - vient d'inaugurer sa 25è clinique privée à Marrakech. Et il ne compte pas s'arrêter de si tôt. 10 autres unités devraient voir le jour d'ici à 2025, année qui coïncide avec la tenue de la Coupe d'Afrique des nations (CAN) sur le sol marocain. 

Mais dans un Maroc où le taux d'occupation des lits avoisine les 60%, l'essor des cliniques privées n'est pas la garantie d'une offre de soins adéquate. Difficile d'imaginer un investisseur construire une clinique dans une zone enclavée, avec une population insolvable, où les patients seraient plus rares que les mouches. 

Pour ne manquer aucune info santé, abonnez-vous à notre newsletter !