Le Maghreb a du mal à retenir ses médecins
De plus en plus de médecins maghrébins s'exilent en raison des mauvais salaires et des conditions médiocres de travail. Tunisie, Maroc et Algérie cherchent à riposter.
Les déserts médicaux pourraient bien continuer à s'étendre au Maghreb, et pour une raison très simple : les médecins s'en vont ! En Tunisie, ils sont plus de 600 praticiens à tenter leur chance à l'étranger chaque année. Du côté du voisin algérien, près de 4000 médecins et étudiants en médecine ont postulé pour un départ à l’étranger en 2018. Au Maroc, 630 médecins marocains ont quitté le pays la même année. Et si on se concentre sur les médecins nés dans ces différents pays qui exercent en France, le taux d'émigration dépasse les 23% pour toute la région.
Dans ces trois pays où vivent plus de 90 millions de personnes, l'exode des praticiens ne date pas d'hier. Mais il s'accentue au fil des années. Les différentes grèves et manifestations des médecins révèlent quelques uns des maux de la profession : des salaires très bas, des conditions de travail difficiles, des hôpitaux asphyxiés, des équipements qui ne répondent pas aux normes reconnues de qualité et de sécurité.
Pour couronner le tout, même si la formation médicale a toujours été bonne dans ces pays, les étudiants sont de plus en plus nombreux à vouloir s'exiler. En même temps, la privatisation graduelle de la santé au Maghreb a créé un gros déséquilibre entre le secteur public et le secteur privé. De quoi pousser encore plus les médecins à s'installer sous d'autres cieux.
Le Maghreb essaie de riposter
Face à cet exode massif et sans retour, le Maghreb essaie de combler, tant bien que mal, la fuite des cerveaux. Pour cela, les Nord-Africains organisent des concours pour recruter des médecins... au Sud. Comme c'est le cas en Tunisie ou font carrément appel à du personnel qualifié en provenance des pays d'Afrique de l'Ouest. Car au-delà d'une simple désertification, l'exode des médecins maghrébins menace la pérennité des système de santé -déjà fragiles- de leurs pays.
Au Maroc, ce sont les facultés privées qui se sont multipliées pour pallier le manque de médecins. Dans ce pays de 36 millions d'habitants, on compte 7,3 médecins pour 10.000 personnes. C'est 3 fois moins que les 23 recommandés par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). En Algérie, le conseil de l'ordre des médecins avait carrément décidé de suspendre les remises d’attestations d’exercice et de bonne conduite, des documents nécessaires pour la constitution du dossier d'immigration et d'exercice temporaire des médecins en Europe.
Pour freiner la fuite des cerveaux, plusieurs experts encouragent aussi les gouvernements à consacrer une plus grosse part de leur budget à la santé. Mais pour l'heure, la part des dépenses représentent seulement près de 6% du PIB au Maroc, 6,7% en Tunisie et 7,2% en Algérie. Un niveau bien inférieur de la moyenne mondiale qui avoisine les 10%. Il est donc grand temps que les pouvoirs publics s'engagent dans une revalorisation de ses médecins et une restructuration du système hospitalier. C'est le seul moyen d'en finir avec cette hémorragie.
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