Coronavirus : ils annoncent des “miracles”, méfions-nous !
Un chef religieux qui affirme, contre toute évidence, que le coronavirus a quitté son pays. Un président qui prétend distribuer un remède, un autre qui annonce un vaccin. Le coronavirus nous a-t-il rendus fous?
Prudence est mère de toute vertu ! C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit de médecine, une discipline qui aime le temps long car ses avancées nécessitent des vérifications pointues. On ne joue pas avec la vie des gens ! Et lorsque l’on affronte un nouvel ennemi comme le coronavirus, sorti “de nulle part” il y a quelques mois, il ne faut pas l’oublier...
Le Covid-19 est encore drapé de mystère. Scientifiques et médecins en apprennent tous les jours sur son mode de transmission, sa contagion, son traitement… Et bien souvent, ils ne sont pas d’accord ! C’est par leur opposition que la science progresse. En témoigne le débat qui fait encore rage sur le traitement par le “cocktail” de médicaments hydroxychloroquine et azithromycine. Considéré comme efficace dans certains pays du Continent, comme l'Algérie, le Maroc, le Kenya, le Sénégal, le Tchad ou encore le Congo-Brazzaville, il est mis au rebut par d’autres états comme l'Egypte ou la Tunisie...Retour à la case départ pour la chloroquine ?
Trump et Bolsonaro jouent les cobayes…
Aussi imprudents que les médecins “charlatans”, certains politiques surfent sur le coronavirus pour se refaire une santé auprès de leur population. Fervent défenseur de la chloroquine, le président américain Donald Trump a ainsi assuré qu'il en prenait chaque jour à titre préventif!
Autre populiste des Amériques, le président brésilien Jair Bolsonaro a lui attendu d'être testé positif au Covid pour en prendre. Il a même vanté l'hydroxychloroquine dans une vidéo publiée sur Facebook. "C’est sûr, ça marche!", a-t-il assuré, avant d'avaler un comprimé avec un verre d'eau et de conclure: "J'ai confiance en l'hydroxychloroquine, et vous?". Il est même venu acclamer une foule de supporters en brandissant une boîte du médicament !
Poutine teste “son” vaccin sur sa fille
Cette semaine, c’est le président russe qui s’est mis à la médecine spectacle. "Ce matin, pour la première fois au monde, un vaccin contre le nouveau coronavirus a été enregistré", a déclaré Vladimir Poutine, ajoutant sans aucune prudence : "Je sais qu'il est assez efficace, qu'il donne une immunité durable". Sans aucun doute !Retour à la case départ pour la chloroquine ?
Argument massue : il l’a fait tester sur sa propre fille qui se porterait à merveille ! Dans la foulée, de nombreux scientifiques et l'Organisation Mondiale de la Santé ont fait part de leur scepticisme quant à la rapidité avec laquelle ce vaccin aurait été mis au point. Mais, forcément, les déclarations sages sont moins spectaculaires….
Qu’on ne se méprenne pas : chaque pays est souverain sur sa politique de santé et n’a pas a recevoir l'aval des organisations internationales pour “accélérer” s’il y a urgence pour sa population et s’il est transparent sur ses motivations. Mais faire de la médecine un spectacle et écarter systématiquement tout doute raisonnable n’a jamais servi une politique de santé publique.
Covid Organics : le président malgache doute moins que les médecins
Autre avocat des remèdes miracles le président malgache Andry Rajoelina et son Covid Organics. "Cette tisane donne des résultats en sept jours", s'était-il réjoui pour son lancement en ingurgitant une dose sous l'oeil des caméras. "Je vais être le premier à boire ça aujourd'hui, devant vous, pour vous montrer que ce produit guéri et ne tue point", avait-il lancé aux sceptiques qui doutaient des vertus de cette potion magique !
Quatre mois plus tard, malgré l'augmentation du nombre des contaminations dans son pays, le président malgache défend toujours son “remède”, affirmant que sans cette potion, son pays aurait vu "des cadavres éparpillés dans la rue".Retour à la case départ pour la chloroquine ?
“Une efficacité limitée”
"Pour voir si le Covid Organics marche, il suffit de voir le nombre de cas", constate, plus prudent que son président, Mirato Rabearson Mahefamanana, médecin généraliste à Madagascar. "Pourquoi y en a-t-il autant actuellement ?", pointe-t-il.
Dans des pays africains qui ont reçu des stocks de tisane, des voix sèment aussi le trouble sur l'efficacité de la tisane malgache. Au Congo-Brazzaville, où des tests ont été effectués, "les résultats penchent vers une efficacité limitée", assure Alexis Elira Dokekias, responsable de la prise en charge des malades du coronavirus. Ce débat aura au moins eu le mérite de relancer les recherches scientifiques sur l'Artemisia, alors que les remèdes traditionnels sont parfois traités avec mépris sur le continent.Retour à la case départ pour la chloroquine ?
“Nous avons vaincu le Coronavirus”
Vous trouvez que les politiques devraient rester à leur place en gérant l’impact du virus sur leurs système de santé et leur économie? Alors que penser de l'attitude des hommes de foi qui jouent les médecins ? Certains semble avoir aussi oublié la prudence la plus élémentaire !
Il en va ainsi de l’archevêque métropolitain de Douala qui, après avoir prétendu avoir trouvé un remède, a tranquillement annoncé cette semaine à ses fidèles la fin de la guerre qu’il mène depuis quelques mois contre la Covid-19. “Nous avons vaincu le coronavirus. Le stock des remèdes contre cette pandémie chôme depuis quelques jours dans nos hôpitaux catholiques, car il n’y a presque plus de malades. Nous rendons grâce à Dieu et à la très Sainte vierge Marie pour cette merveille“, a déclaré Monseigneur Samuel Kleda en assurant que “le coronavirus n’est plus une menace au Cameroun“.Retour à la case départ pour la chloroquine ?
“Gardez vos masques”
Ces effets de manche ne servent personne. Faire croire aux populations que les choses sont simples quand elle sont complexes, que la guerre contre le virus est terminée parce qu’un traitement ou un vaccin existe, c’est leur mentir ! Que l’on soit homme politique ou homme d’église.
Le rappel de la sagesse peut d’ailleurs venir de très près. Selon nos confrères de l’Agence Cameroun Presse, Monseigneur Jean Mbarga, archevêque métropolitain de Yaoundé, a ponctué ainsi sa messe célébrée ce dimanche 9 août à la paroisse Sainte Odile de Nomayos : “Gardez vos masques, car le Coronavirus n’est pas terminé”, a-t-il déclaré face aux fidèles, semblant répondre à son “collègue” de Douala . Tout est dit : la prudence s'accompagne souvent d'humilité...
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