Covid-19 en RDC : A Lubumbashi, le couvre-feu menace les femmes

Dans les quatre coins de Lubumbashi, la capitale économique de la République démocratique du Congo, les habitants dénoncent une hausse de l’insécurité chronique avec le dernier couvre-feu décrété face au coronavirus.

Badr Kidiss avec AFP
Badr Kidiss avec AFP
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Depuis l'instauration du couvre-feu, de nombreuses femmes, à Lubumbashi, affirment être violées (photo d'illustration)
Depuis l'instauration du couvre-feu, de nombreuses femmes, à Lubumbashi, affirment être violées (photo d'illustration)

La situation est compliquée.`` De nombreuses femmes, à Lubumbashi, affirment être violées lors de cambriolages à main armée. Depuis la mise en place du couvre-feu décrété le 18 décembre pour contrer le coronavirus, les habitants de la capitale économique de la RD Congo dénoncent une hausse de l’insécurité. 

Deux étudiantes, deux sœurs, une dame de 51 ans… Sept femmes confient ce 13 janvier avoir subi des violences sexuelles chez elles lors de braquages entre 21h00 et 05h00, commis pour la plupart par des hommes en uniformes. La police ne nie pas la présence de "brebis galeuses" dans ses rangs. "C’était à 23h05, j’ai entendu des coups devant ma porte", témoigne Dominique (prénom changé), sous le choc des événements de la nuit du 10 au 11 janvier, quand des hommes ont cassé la vitre et forcé le cadenas de sa maison d'un quartier périphérique, Kalubwe. Les agresseurs portaient des uniformes de la police, ajoute cette mère de famille de 26 ans (des uniformes de l’armée, corrigent ses voisins, également attaqués). "Je leur ai donné 300 dollars".

 "Combien de femmes à la maison?"

Les braqueurs lui ordonnent de se déshabiller. L'institutrice affirme en pleurs avoir été violée par trois individus à qui elle a tenté de résister. "Ils ont cru que j’étais morte. Ils sont partis dans l’autre parcelle". "J’étais au salon", poursuit sa voisine, Patricia (prénom changé), 22 ans, qui montre une vitre brisée à l’entrée du domicile familial : "Les bandits ont demandé de l’argent. Maman leur a donné 60 dollars. Après, ils ont demandé : vous avez combien de femmes à la maison ?". Avant d'ajouter : "Ils ont déchiré ma robe, ils m’ont frappée".

Cambriolés fin décembre dans un autre quartier, Marie et Emmanuel (prénoms modifiés) rapportent que les cambrioleurs s’en sont pris à leur petite fille de sept mois, qu’ils ont menacé de "jeter à terre". "Quand on les a suivis, ils m’ont tabassée. Ils sont passés à l’acte", raconte Marie. Sa soeur qui vit avec le couple a également été abusée violemment.

"Depuis plus de trois ans, la province du Haut-Katanga (dont Lubumbashi est le chef-lieu) connaît une montée sans précédent de la criminalité urbaine suivie de cas de vols, de viols et de meurtres", avance la société civile dans un rapport datant de juillet. L’insécurité chronique frappe les classes moyennes ou les pauvres des quartiers périphériques, plus que les nantis (expatriés, notables) qui vivent dans des villas sécurisées.

"Porter plainte ne sert à rien" 

L'année 2021 ne s’annonce guère meilleure. Ce mardi 12 janvier, vers 8h00 du matin, cinq hommes armés ont braqué et blessé en plein centre-ville un "cambiste" (un agent de change). Son père avait été tué dans un braquage l’année dernière. Sur place, ses collègues et des passants dénoncent l’inertie des forces de sécurité. Trois des cinq braqueurs présumés ont été présentés mardi au gouverneur de province.

"Porte plainte ne sert à rien", soupire un homme d'une cinquantaine d'années, attaqué lui aussi dans la nuit du 10 au 11 janvier au quartier Kalubwe. "Il faut payer 20 dollars pour porter plainte", accuse un agent de l'Etat au ministère des Affaires foncières.

Le commissaire de police Louis Segond Karawa reconnaît "des actes de délinquances" pendant cette période de couvre-feu. "Il y a toujours des brebis galeuses, nous ne pouvons pas le nier", ajoute-t-il au sujet de l'implication des hommes en uniforme. Les fautifs font l'objet de "sanctions sévères" - quand ils sont attrapés. Le général reconnaît "quelques cas isolés de viols", qu’il met sur le compte du "chantage" des braqueurs.

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