Au Sénégal, la lèpre est toujours là

La lèpre est une maladie millénaire encore loin de faire partie du passé... Au Sénégal, en 2019, elle se conjugue au présent.

Badr Kidiss avec AFP
Badr Kidiss avec AFP
Rédigé le , mis à jour le
La lèpre peut avoir de graves séquelles
La lèpre peut avoir de graves séquelles

La lèpre est une maladie antique mais elle est loin d'avoir disparu ! Elle a été relevée chez 210 000 personnes dans le monde pour la seule année 2017 et on compte encore près de trois millions de lépreux. Aujourd’hui classée parmi les maladies tropicales négligées, elle continue à sévir dans de nombreux pays notamment en Asie, en Amérique Latine et chez nous en Afrique où elle fait des ravages et détruit des vies.

Mais de quoi parle-t-on?  La lèpre est une infection bactérienne causée par le bacille de Hansen qui se transmet par le contact des gouttelettes nasales. Son temps d'incubation est très lent : il varie de 5 à 20 ans . Cela veut dire que le temps entre le moment où on est en contact avec la maladie et celui ou elle commence à nous "attaquer" est de plusieurs années ! Cela explique en partie la difficulté de l’éradiquer...

Cocktail d'antibiotiques

Tout le malheur de la lèpre vient des infirmités lourdes et des mutilations qu’elle provoque à des stades avancés de la maladie. C'est d'autant plus cruel que, détectée à temps, elle se soigne bien et ne laisse presque pas de séquelles ! La polychimiothérapie (combinaison de trois antibiotiques : Dapsone, Rifampicine et Clofazimine), recommandée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) depuis 1981 et mise gratuitement à disposition des malades, est efficace et le patient n’est plus contagieux au bout de 48h du début du traitement.

Encore faut-il que les sujets infectés soient correctement identifiés. La lèpre est de moins en moins enseignée et les nouvelles générations de médecins ont de plus en plus de mal à la reconnaitre. C'est une erreur ! Car un dépistage précoce constitue la meilleure garantie de guérison et les dermatologues jouent ici un rôle clé du fait que très souvent la maladie se révèle au début par des taches cutanées "hypopigmentées", c'est à dire claires, et insensibles au toucher. Ces tâches sont facilement détectées par un œil expert.

Eliminée... mais pas éradiquée

Au Sénégal, il y a maintenant plus de 20 ans qu’on a franchi le seuil d’élimination de la lèpre, fixé par l’OMS à un cas pour 10.000 habitants. Depuis, on ne parvient toujours pas à éradiquer, c'est à dire supprimer totalement, tous les foyers de contamination. Les régions de Kaolack, Dakar, Thiès et Diourbel sont les zones les plus touchées. Le Centre Hospitalier de l’Ordre de Malte (CHOM), situé au cœur de la capitale, est totalement dédié à la prise en charge de la lèpre et de ses séquelles et s’implique également dans la formation du personnel médical et paramédical et la réinsertion sociale des malades souvent stigmatisés et mis à l’écart de la société du fait des préjugés qui persistent autour de la lèpre, cette maladie maudite, "ce mal que tous craignent et voient comme une punition divine".

Dans le Plan National d’Elimination de la Lèpre, on ambitionne de l’éradiquer du Sénégal d'ici 2022 mais cet objectif est difficile à atteindre sans véritablement renforcer les moyens aujourd’hui bien limités surtout en matière de prévention. Il s’agit avant tout d’adopter un dépistage actif en allant directement au plus près des personnes touchées et en luttant efficacement contre la pauvreté qui ne facilite pas une bonne hygiène quotidienne. Sans cela, il sera difficile de venir à bout de cette maladie lourde de conséquences.

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