Au Cameroun, l'épilepsie est trop souvent "laissée" aux guérisseurs....

La prévalence de l’épilepsie est très élevée au Cameroun avec une prise en charge très peu effective. Faute de réponse médicale, les parents des enfants épileptiques ont bien souvent recours aux guérisseurs traditionnels.

Fabrice Beloko
Rédigé le , mis à jour le
L'épilepsie est un mal encore méconnu au Cameroun (Illustration)
L'épilepsie est un mal encore méconnu au Cameroun (Illustration)

C'est un mal relativement fréquent mais trop souvent ignoré au Cameroun. Les personnes atteintes d’épilepsie sont très peu prises en charge dans le pays. C'est pourtant un des plus grands foyers de cette maladie neurologique en Afrique avec plus de 5% de la population touchée. Mais la grande majorité des patients ignorent que cette maladie est curable, qu'il y a des solutions....

Les études réalisées montrent que l’épilepsie est bien connue des populations mais est encore entourée de beaucoup de tabous et rejet à l’origine d’exclusion de ces patients. Et faute de réponse médicale, les parents des enfants épileptiques ont bien souvent recours aux guérisseurs traditionnels, aux prêtres exorcistes et pasteurs des églises de réveil....

Potions de grand-mère...

A Yaoundé, Marie, jadis fiancée, est aujourd’hui célibataire à cause du rejet de sa fille de 10 ans déclarée épileptique il y a un an. "Au début, ma mère m’a dit que c’est à cause de ma belle-mère qui ne voulait pas que son fils m’épouse. Le père de cette enfant a disparu depuis ce temps, sa famille me chasse!", relate-t-elle. Convaincue que son enfant est l’objet d’attaques mystiques des sorciers de son village, elle croit que sa fille vit encore grâce aux neuvaines et aux potions de sa grand-mère.

Etant au chômage et précaire, elle est réfractaire au traitement médical moderne... La pathologie de sa fille pourrait être liée au lieu où elle a longtemps vécu notamment dans la commune d’Ombessa dans la région Centre dont-elle est originaire. En 2009, cette zone a été déclarée ayant le plus de malades au monde avec un taux de 6% de personnes épileptiques , selon le spécialiste Dr Fidèle Dema, par ailleurs directeur de l’hôpital de district de Yoko dans le département du Mbam-et-Kim, région du Centre.

Un trouble du développement du cerveau 

L'épilepsie est une maladie neurologique fréquemment rencontrée en Afrique Subsaharienne. Chez un enfant, la maladie s’accompagne des difficultés d’apprentissage scolaire, trouble d’attention, trouble du comportement. La neuropédiatre Christelle Ngo Kana, explique : "L’apparition de l’épilepsie chez un enfant interfère avec un développement normal du cerveau. Les conséquences de l’épilepsie sur le développement de l’enfant seront fonction de l’âge, du site de l’activité épileptique, du développement des fonctions intellectuelles et de la motricité au moment de l’apparition des premières crises".

Pour améliorer la qualité de vie du patient épileptique, la spécialiste conseille les médicaments anti-épileptiques qui permettent de contrôler les crisesmais aussi  de diminuer leur fréquence.

Principal foyer de l'épilepsie idiopathique 

Cette maladie reste largement mystérieuse. Comme il est encore difficile de donner une cause réelle à cette maladie, cela pousse les populations peu éduquées à se rabattre sur des solutions traditionnelles. Selon les enquêtes menées en Afrique centrale et à Madagascar, c'est au Cameroun que l'épilepsie "idiopathique" est la plus fréquente. Elel représente deux tiers des cas.

La Ligue camerounaise de lutte contre l’épilepsie organise - avec l’aide du ministère de la santé publique - la lutte contre la maladie au Cameroun, à travers des campagnes de sensibilisation, des consultations de malades, des séances de formation des médecins généralistes, des infirmiers, des enseignants des écoles et des lycées dans la prise en charge médicale et sociale des épilepsies. Le combat sera encore long, mais il y a du progrès...

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